Ressources pédagogiques de la filière semences
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La biologie de synthèse

LA BIOLOGIE SYNTHÉTIQUE

La biologie synthétique est une nouvelle discipline qui utilise les connaissances du génie génétique et moléculaire pour fabriquer des composés ou des systèmes biologiques qui existent ou non dans la nature.

La construction de génomes de plus en plus longs

En 2007, à partir de la bactérie Mycoplasma genitalium a été « fabriquée » Mycoplasma laboratorium, la première bactérie « synthétique ». Elle contient un nombre réduit de gènes. En 2010, le premier organisme contenant un génome intégralement fabriqué par l’homme est décrit dans la revue Science. L’équipe de chercheurs a remplacé le génome naturel de la bactérie Mycoplasma capricolum, responsable de la pneumonie chez la chèvre, par un génome pratiquement identique mais synthétisé en laboratoire. Le génome de cette bactérie consiste en un seul chromosome contenant 1,155 millions de paires de base. Il avait été préalablement décrypté et l’information génétique stockée dans des bases de données. Cependant, il ne s’agit pas d’une bactérie synthétique mais seulement d’une bactérie contrôlée par un génome synthétique, qui a été assemblé à partir de séquences d’ADN synthétisés, le cytoplasme étant celui de la cellule hôte initiale.

L’étape suivante sera de concevoir un organisme de 2 millions de paires de base, taille qui permet d’envisager des applications en biotechnologies : produire des bactéries capables de fabriquer des médicaments, dépolluer les sols ou produire des biocarburants à partir de biomasse non alimentaire.

La production de molécules d’intérêt par des organismes hétérologues (bactéries, levures, cellules animales et végétales, plantes)

Cette technologie est déjà une réalité. Parmi les résultats obtenus :

  • La construction d’outils de diagnostic : tests très sensibles pour les patients atteints d’hépatite, du Sida ou de divers cancers.
  • La fabrication de médicaments purs et moins chers : tel que l’artémisinine (antipaludéen) par la transformation de levures, en introduisant l’ensemble des gènes nécessaires à la voie de biosynthèse de ce composé.
  • La modification d’algues bleu-vert pour la fabrication de biocarburants.
  • La dépollution des sols (détection ou dégradation de substances toxiques) par des bactéries :

– Modification d‘Escherichia coli pour la détection rapide et peu coûteuse de l’arsenic (via un simple test pH),

– Modification de Rhodococcus Sp. pour la dégradation de produits toxiques.

 

PRINCIPE D’INGÉNIERIE DE LA BIOLOGIE DE SYNTHÈSE

Définition de l’agence européenne ERAsynbio

« La biologie de synthèse est l’ingénierie de la biologie : la (re) conception et la construction délibérées de nouveaux composants, dispositifs et systèmes biologiques et basés sur la biologie afin de remplir de nouvelles fonctions à des fins utiles, qui s’appuient sur des principes élucidés de la biologie et de l’ingénierie. »

Elle est un domaine émergent à la frontière de la biologie (des biotechnologies), des mathématiques, de l’informatique, de la physique et de la chimie.


Historique : du génie biologique à la biologie de synthèse

La biologie de synthèse se développe avec l’essor des biotechnologies et de l’informatique.

1965 : découverte des enzymes de restriction.

1970 : premières techniques d’ADN recombinant.

1977 : découverte du transfert de gènes par des agrobactéries.

1984 : invention de la réaction en chaîne par polymérase PCR.

2004 : acte « officiel » de création de la biologie de synthèse.

2007 : première bactérie de synthèse Mycoplasma laboratorium, dans laquelle le chromosome naturel a été remplacé par un chromosome de synthèse doté d’une séquence très similaire.

2015 : 116 procédés industriels ou produits issus de la biologie de synthèse sur le marché ou proches de l’être.


Une ingénierie biologique

La biologie de synthèse est un nouveau domaine qui utilise les connaissances du génie génétique et moléculaire pour fabriquer des composés ou des systèmes biologiques qui existent ou non dans la nature. Elle regroupe trois démarches scientifiques différentes :

  • la construction de composés élémentaires d’ADN destinés à être assemblés
  • la synthèse de génomes complets ou de plus en plus longs
  • la production de protocellules (cellules rudimentaires)

Pensée comme une ingénierie, la biologie de synthèse déroule une procédure en étapes successives de modélisation mathématique, de simulation puis de réalisation biologique, avant validation.


Les objectifs

  • Tester et améliorer la compréhension des principes gouvernant la biologie ;
  • Construire de façon stable et fiable des organismes accomplissant des fonctions biologiques complexes répondant à diverses applications (énergie, environnement, santé…).

Un des axes majeurs consiste à concevoir rationnellement des circuits biochimiques différents, qu’ils soient métaboliques et/ou régulateurs.
De nouveaux circuits métaboliques permettent de modifier une chaîne biochimique transformant un composé naturel en un produit valorisable. Une modification de type régulatrice permet de déclencher une telle production à un moment opportun, de la réguler ou d’améliorer son efficacité. Dans un bioprocédé, les catalyseurs sont presque toujours des enzymes qui peuvent être modifiées, inhibées ou remplacées.

Bio-production par les plantes

Les plantes peuvent être utilisées pour produire des composés utiles.

Si la voie métabolique existe, des modifications différentielles sur les gènes impliqués peuvent permettre une surproduction d’un composé. Une inactivation peut aussi aboutir au résultat souhaité.

Si la voie métabolique n’existe pas, il est nécessaire de transférer la chaîne métabolique permettant la production du composé utile

Ces modifications nécessitent de comprendre les mécanismes d’accumulation des composés actifs par la plante et de modifier, si nécessaire, des séquences régulatrices.

Les applications :

  • Production de protéines complexes, telles que des anticorps ou des enzymes pour des applications de recherche.Production d’antigènes, y compris de particules ressemblant à des virus, pour la mise au point de vaccins ou la nanotechnologie.
  • L’ingénierie de la voie métabolique pour générer des composés biochimiques complexes qui sont difficiles voire impossibles à synthétiser chimiquement ou qui ne se trouvent que dans des espèces rares ou à l’état de traces dans la nature.

Amélioration de la photosynthèse

La photosynthèse est le processus bioénergétique qui permet à des organismes de synthétiser de la matière organique en utilisant l’énergie lumineuse. L’efficacité énergétique est très faible (0,1 à 8 %) et des projets de biologie de synthèse cherchent à l’améliorer.

Différents éléments limitants de la chaine métabolique peuvent faire l’objet de recherche : les pigments pour étendre le spectre absorbé, l’enzyme RuBisco (plante en C3) qui incère du CO2 dans la chaine métabolique dont on connait une forme plus efficace chez les algues rouges, ou encore parvenir à produire de l’hydrogène utilisable comme source d’énergie.

Certaines plantes tropicales ont un mécanisme photosynthétique différent (dit en C4) qui est plus efficace. Certains projets envisagent de modifier ainsi le riz de type naturel en C3 vers le type C4 car l’anatomie foliaire de cette plante le permet.


Fixer plus de carbone

Un projet de biologie de synthèse porte sur une alternative synthétique aux six voies naturelles de fixation de CO2 chez les plantes en C3. Les auteurs ont élaboré in vitro un cycle de fixation continue du CO2, cycle basé sur 17 enzymes -certaines optimisées- choisies dans neuf organismes des trois domaines du vivant (bactéries, archées et eucaryotes).


Fixer l’azote atmosphérique

Rares sont les plantes qui ont la capacité, comme les légumineuses, de prélever l’azote de l’air et de le restituer dans le sol au niveau des racines. Elles travaillent en fait en symbiose avec des bactéries du genre Rhizobium.

Les recherches portent sur trois pistes :

  • Transférer les gènes des légumineuses dans les céréales ;
  • Associer des endophytes (bactéries ou champignons) capables de fixer l’azote aux céréales ;
  • Introduire l’enzyme nitrogénase catalysant la fixation d’azote pour créer une nouvelle chaine métabolique.

Lutter contre les maladies, induire des résistances contre les parasites

Face aux défis démographiques, climatiques et environnementaux, les biologistes recherchent de nouvelles méthodes de lutte contre les maladies. Des microbes peuvent aider à améliorer la fertilité des sols et augmenter l’absorption des nutriments.

La bonne santé des plantes permet non seulement de lutter naturellement contre les maladies mais aussi à gérer d’autres stress comme les fluctuations hydriques et thermiques.

Des molécules brevetées du microbiome du sol ou des racines sont déjà disponibles. La biologie de synthèse pourrait permettre une production de ces molécules par la plante, en transférant les gènes et les régulateurs nécessaires à l’installation et le fonctionnement du circuit biochimique correspondant.