Ressources pédagogiques de la filière semences
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Les cartes génétiques

LA CARTOGRAPHIE DES MARQUEURS MOLÉCULAIRES

Les premières cartes génétiques partielles du maïs furent publiées en 1935, et réalisées à l’aide de marqueurs morphologiques. Les cartes génétiques permettent de représenter la disposition des gènes ou des marqueurs sur un chromosome.

La figure représente une carte génétique de la pomme de terre obtenue à partir de marqueurs RFLP. Les marqueurs RFLP utilisés sont répartis sur les 12 chromosomes de la pomme de terre.

Principe d’établissement de cartes génétiques

Les propriétés de la ségrégation des gènes sont utilisées. Le plus couramment, une descendance issue de deux parents homozygotes est utilisée. On obtient en génération F2 une descendance en ségrégation, une séparation des caractères des deux parents et donc aussi une ségrégation au niveau des marqueurs.

En effet, à la méiose, les chromosomes non homologues ségrégent indépendam­ment. Il en est de même pour les gènes portés par ces chromosomes. En revanche, des gènes portés par un même chromosome ne ségrégent pas indépendamment, et cela d’autant moins qu’ils sont plus proches. Ce sont ces propriétés que l’on met à profit pour estimer la position des marqueurs. Lorsque des marqueurs ne ségrégent pas indépendamment dans une descendance, on dit qu’ils sont « liés ».

Des tests statistiques simples permettent de décider si deux marqueurs sont indépendants ou non, ils forment alors un groupe de liaison. Il est ensuite possible d’attribuer chaque groupe de liaison à un chro­mosome. Lorsque le nombre de marqueurs utilisés est suffisamment élevé, le nombre de groupes de liaison correspond au nombre de chro­mosomes. On dit que l’on a saturé le génome.

LA CARTOGRAPHIE D’UN GÈNE MAJEUR

Localiser les gènes majeurs

Quand un caractère est dû à l’effet d’un gène principal, on parle de gène majeur. L’apparition des marqueurs moléculaires a permis l’élaboration de méthodologies pour localiser ces gènes. Le principe est le même que celui servant à l’élaboration des cartes génétiques. Plus la distance qui sépare un marqueur moléculaire et un gène d’intérêt sur la carte génétique est faible, plus la probabilité qu’ils soient transmis ensemble à la descendance est grande.

Exemples

De nombreux gènes majeurs ont déjà été localisés. On peut citer par exemple : des gènes de qualité codants une protéine de réserve du blé, des gènes codants le taux en acide érucique chez des oléagineux, des gènes de nanisme chez le maïs ou le colza, des gènes de résistance aux champignons chez la tomate, la laitue, le blé, le tournesol, dont le gène Pl1 impliqué dans la résistance à la race 1 du mildiou, des gènes de résistance aux virus chez la pomme de terre, l’orge, des gènes de résistance aux nématodes chez la betterave, des gènes de restauration de la stérilité mâle cytoplasmique chez le colza et le tournesol.

Détection de la liaison

Elle consiste à choisir des parents suffisamment polymorphes pour le caractère agronomique et à observer dans la descendance la ségrégation des caractères phénotypiques et du génotype des marqueurs moléculaires. Une des populations qui peut être retenue pour l’analyse de la ségréga­tion pour un gène majeur est une descendance F2 issue de deux parents homozygotes. Dans le cas d’un gène de résistance, il s’agit du croisement d’un parent sensible et d’un parent résistant. Ainsi en F2, on observe un quart d’individus sensibles et trois quarts de résistants. L’idée qui a été émise par Michelmore et al. en 1991 est de regrouper l’ADN des individus F2 sensibles et l’ADN des individus F2 résistants. Cette technique est appelée BSA, Bulk Segregant Analysis, c’est l’analyse de ségrégation en mélange.
Le génotype du marqueur est ensuite déterminé. Si le marqueur testé est lié au gène de résistance, les plantes sensibles portent l’allèle marqueur caractéristique des plantes sensibles. En revanche, les individus résistants sont soit homozygotes pour le gène de résistance, soit hétérozygotes, il en va donc de même pour leur génotype du marqueur. Ainsi, en mélange, les individus résistants présentent au moins l’allèle marqueur caractéristique des plantes résistantes.

Apport à la sélection

La mise en évidence d’une liaison entre un marqueur moléculaire et un gène majeur est une aide précieuse pour le sélectionneur. Comme un fragment de feuille suffit à obtenir l’ADN nécessaire pour établir l’empreinte génétique d’une plante, un tri précoce et précis peut être envisagé dès le début de la croissance des plantes. Ceci permet un gain de temps, il n’est pas nécessaire d’attendre la visualisation phénotypique du gène.
On peut ainsi cribler une collection de géniteurs et déterminer si par exemple des plantes possèdent une source de résistance.
D’autre part, par le biais de marqueurs moléculaires, il est possible d’identifier les plantes hétérozygotes, donc porteuses d’un gène récessif dont le phénotype n’est pas observable.

Analyse fine de la structure du gène

L’objectif final est le clonage du gène et l’analyse de son mode d’action. Ceci fait appel à des techniques de biologie moléculaire, appelées clonage positionnel. Cette caractérisation fine de la structure du gène permet également de faciliter une sélection précoce. L’isolement de ce gène rend aussi possible son transfert par génie génétique vers d’autres espèces.

LA CARTOGRAPHIE D’UN CARACTÈRE QUANTITATIF

Qu’est-ce qu’un caractère quantitatif ?

De très nombreux caractères sont des caractères mesurables comme le rendement, la précocité, la taille, la qualité des fruits. On observe une variation continue de leur valeur. Dans ce cas, il n’y a plus d’opposition absolue entre deux phénotypes comme par exemple : résistant/sensible. On admet que plusieurs secteurs chromosomiques, portant un ou plusieurs gènes, sont impliqués dans le contrôle de ces caractères dits quantitatifs, et que de nombreux allèles sont responsables de la variabilité. Ces locus sont appelés QTL : Quantitative Trait Loci (Locus de Caractères Quantitatifs).

Exemple de la localisation de QTL impliqués dans la variation de la dureté du grain de blé

Un des facteurs affectant la qualité boulangère des blés cultivés est la dureté des grains. L’établissement de cartes génétiques sur le blé a permis d’identifier plusieurs QTL impliqués dans la variation de la dureté du grain. Un des QTL majeurs est situé sur le chromosome 5. L’infographie associée représente une carte génétique d’une partie du chromosome 5. En abscisse sont données les distances entre les marqueurs RFLP le long de ce bras de chromosome. A la taille des barres est associé un test de présence du QTL : la barre la plus grande correspond à la position statistique la plus probable du QTL. Ainsi, un QTL de la dureté du grain a été trouvé à proximité du marqueur Xmta9. C’est un marqueur du QTL.

Les apports à la sélection

Avec les QTL, il devient possible d’associer pour chaque individu une valeur à un segment chromosomique sur la base de la valeur génétique du QTL. Ainsi, une des premières applications est donc de prédire la valeur génétique d’une descendance, d’un croisement, grâce à la corrélation entre les marqueurs et le caractère quantitatif. On évalue donc plus précisément la valeur des individus candidats à la sélection. Une autre application repose sur la mise en évidence d’allèles favorables au QTL. Il est alors possible de cumuler ces allèles dans un individu par rétrocroisement notamment. On parle alors de construction de génotypes.

Localisation d’un QTL

Prenons l’exemple où l’on croise deux individus différents pour la taille et considérons un marqueur quelconque présentant un polymorphisme chez ces deux parents. Dans la génération F2, il existe trois génotypes pour ce marqueur : un quart de chaque homozygote et la moitié de plantes hétérozygotes. L’idée est de réaliser trois classes d’individus sur la base du génotype à ce marqueur, et de comparer les moyennes des tailles des individus de ces trois classes. Si les moyennes sont déclarées significativement différentes, cela signifie que, sur la base du génotype au marqueur, il est possible de différencier trois classes d’individus pour le QTL. Ainsi est mise en évidence la présence d’un QTL.

LA CARTOGRAPHIE COMPARÉE

Lorsque, entre des espèces, il y a conservation de l’ordre des gènes et des relations de proxi­mité entre des marqueurs sur les chromosomes, on parle de synténie. Il existe donc des similitudes de séquences codant pour une même protéine et même une similitude de localisation chromosomique de ces gènes semblables entre espèces différentes.

Exemples

Une bonne conservation des groupes de liaisons et de l’ordre des marqueurs a été observée entre le riz, la canne à sucre, le sorgho, le maïs, et les céréales à paille comme le blé, l’orge, le seigle et l’avoine. La figure montre la conservation de quelques gènes sur les trois espèces riz, maïs et blé.
Par exemple, le gène waxy amylopectine très ramifée, se trouve sur le chromosome 6 du riz, 9 du maïs, et 7 du blé. Il s’agit donc de régions synténiques. On constate égale­ment au sein du génome du maïs des homologies. Le chromosome 5 par exemple a une homologie avec le chromosome 1.
On a montré également que le génome de la tomate et de la pomme de terre sont colinéaires. Il n’y a aucune inversion de l’ordre des gènes de 9 des 12 chromosomes. Seule une inversion paracentrique des 3 derniers chromosomes est observée. Cette synténie se retrouve aussi avec le piment, toutefois les remaniements sont plus nombreux.

Décloisonnement

Cette constatation fait de la cartographie comparée un outil majeur pour décloisonner les programmes de recherche. Un travail réalisé sur une espèce peut ainsi trouver une application rapide et directe sur de nombreuses espèces.

Sondes hétérologues

Ce sont des sondes qui ne proviennent pas de l’espèce étudiée. Sur la base de constatations de synténie, il est possible de marquer le génome d’une espèce en utilisant ces sondes sans avoir à refaire l’effort d’isolement et de criblage de sondes. Elles sont également un outil précieux pour affiner les cartographies comparées.